On l’attendait depuis un moment, et c’est chose faite : Bernard MESSNER, figure incontournable du judo Alsacien, s’est vu décerner en janvier dernier le grade de 8ème dan ! Le tout premier dans la région, synonyme aussi de reconnaissance d’une vie entière consacrée à sa discipline !

Le haut gradé Alsacien a étrenné sa toute nouvelle ceinture lors du Kagami Biraki de janvier dernier à Rixheim (68).

Crédit photo : C.J. Rixheim

En France, ils ne sont qu’une trentaine à l’avoir ce 8ème dan. Le 18 janvier 2020 à l’Institut du Judo de Paris, c’est une grosse délégation du Grand Est qui était présente au Kagami Biraki (cérémonie des vœux) de la F.F.J.D.A. pour accompagner l’Alsacien lors de la remise officielle de la ceinture (rouge et blanche) par Jean-Luc ROUGE (9ème dan et président de la Fédération Française de Judo). Parmi les récipiendaires du 8ème dan de cette promotion 2020, un certain David DOUILLET ! Un grade honorifique destiné à quelques privilégiés, qui récompense essentiellement des parcours atypiques, liés souvent à des résultats sportifs remarquables, mais aussi et surtout à un engagement exceptionnel, particulièrement riche en actions éclatantes voir marquantes. Bernard MESSNER est de ceux qui ont fait du judo l’aventure d’une vie, et ce depuis plus d’un ½ siècle.

Le Thannois d’origine s’oriente à la base vers l’enseignement de l’E.P.S. A l’issue de ses études, il intègre le prestigieux Bataillon de Joinville, période durant laquelle il fera la connaissance de Marie Odile TRUCHOT (décédée en juillet 2018). « Nous nous sommes vite rendu compte que l’on s’attirait mutuellement », se souvient l’Alsacien ». « Nous avons convenu de passer une journée ensemble à discuter. Elle m’a demandé ce que je désirais faire de ma vie, et lui ai répondu que je souhaitais me consacrer à la mise en place d’une structure permettant à des jeunes de réaliser leur passion. Ce projet l’a séduite et, trois jours après, nous avons décidé de nous marier… ».

Dès lors, les travaux s’enchainent au fil des ans, inexorablement. « Toute notre énergie était consacrée au judo, élément central de notre vie », se remémore-t-il. « Sur Strasbourg, nous étions à un niveau où il n’existait pas grand chose, il a fallu tout créer. Aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 2500 jeunes qui sont passés par ces structures. Et tous ont réussi dans la vie ».

En démonstration ici, heureux dans son élément, lors d’une séance mémorable réalisée dans le cadre des célébrations du 40ème anniversaire du Pôle de Strasbourg (novembre 2014)…

Ce premier volet achevé, c’est une autre voie qui s’ouvre à lui lorsqu’il fut élu Directeur du Judo à la Fédération Internationale Universitaire en 1982. Un poste qu’il occupera durant 25 ans ! « A cette époque, seuls les garçons étaient autorisés à combattre », explique l’Alsacien. « Lorsque nous avons organisé le championnat du Monde à Strasbourg (1984), j’ai demandé à ce que les filles puissent y participer. Et l’on m’a donné carte blanche… ». Un engagement qu’il arrêtera en 2007 lorsqu’enfin, comme il l’avait espéré, le judo deviendra partie intégrante du programme des Universiades. Cette riche période lui aura surtout permis de voyager dans le monde entier. « Devenu entre-temps membre du groupement des experts de la Fédération Internationale de Judo, j’étais systématiquement volontaire pour partir. Sur le plan humain, ça a toujours été des aventures formidables ! ». En témoigne notamment son engagement, comme toujours aux côtés de son épouse, mais aussi de son fils Nicolas, devenu par après Directeur « médias » de la F.I.J., au Burundi, ou nombre d’actions humanitaires ont été menées en faveur des populations et des enfants surtout, à travers la mise en place d’une politique de formation, visant le développement scolaire mais aussi celui du judo.

De formidables expériences qu’il mettra au profit de ses différents mandats d’élu, aussi bien à la Ligue d’Alsace de Judo qu’au niveau du comité directeur fédéral. Premier 7ème dan Alsacien (2001), l’évocation d’un probable 8ème était bien loin d’être sa préoccupation première. « Lorsque j’ai commencé à passer des grades, je me voyais bien 6ème dan. Le 7ème, c’était déjà pas mal. Mais le 8ème me semblait très éloigné ». Une promotion finalement très singulière, nécessitant désormais une contribution personnelle sous forme de « mémoire ». « Le 8ème dan, ce n’est pas simplement quelque chose que l’on te donne », précise-t-il. « Maintenant, il faut fournir ce en quoi on le mérite. J’ai très vite adhéré à cela, et il m’a fallu plus de six mois pour rédiger mon document (100 pages !). Pour moi aujourd’hui, un 8ème dan est réellement un pas dans les hauts-grades. Et dans le monde du judo, ça veut dire quelque chose ! Dans la vie d’un judoka, il y a trois âges : un moment où tu pratiques et où tu apprends, un moment où tu transmets (enseignement), et un moment où tu vis le judo. Je suis désormais dans le troisième… ». Et lorsqu’on lui parle de consécration, il ne peut s’empêcher de sourire. « Une consécration, c’est quand tu t’arrêtes », nuance-t-il, non sans une pointe d’ironie. « Et je n’ai pas l’intention de m’arrêter ! ».

Une bonne nouvelle en tout cas pour toutes celles et ceux qui, durant toutes ces années, ont eu le privilège et le plaisir de le côtoyer, aussi bien professionnellement que sur les tatamis. C’est désormais hors du tapis qu’il apportera plus précisément son expertise et son œil averti, induit par le président de la Ligue Grand Est de Judo, Jean-Louis DUVERGEY, pour mener une réflexion sur les grades, sur le perfectionnement des juges et des arbitres. Pour lui, savoir s’adresser aux gens demeure fondamental. « Actuellement, les jurys ont tendance à faire du « flag » », constate-t-il avec regret. « Ils pointent systématiquement du doigt ce qui ne va pas. Or, pour l’avenir du judo, les jurys ont un rôle primordial. Ce sont eux qui doivent permettre aux candidats de garder espoir dans le judo. Si le gars réussit, il faut le féliciter. Mais s’il échoue, il ne faut pas l’écœurer. Au contraire, il faut lui donner envie de revenir et de se représenter ! ». Et il n’est pas rare non plus lors de certaines compétitions, de le voir intervenir, avec autorité s’il le faut, n’hésitant pas à en recadrer certains sur des comportements peu appropriés. « Il faut savoir quelquefois remettre les choses à leur place. C’est aussi le rôle d’un haut-gradé… ».

Bernard MESSNER : quelques dates

1942 : naissance à Thann (68)

1954 : découverte du judo au Lycée Kestner de Thann avec Jean BIASSE

1960 : début en judo au J.C. de Thann

1960 : entre au CREPS de Strasbourg) s’inscrit au J.C. de Strasbourg

1962 : 1er dan de judo (ceinture noire)

1963 : 2ème dan

1965 : réussite au CAPEPS – incorporation au bataillon de Joinville – 3ème dan

1967 : reprise de l’enseignement des cours d’EPS au Lycée Kléber à Strasbourg et au CREPS de Strasbourg – création de l’option judo au CREPS de Strasbourg

1972 : nomination comme responsable technique de l’équipe de France universitaire (jusqu’en 1980)

1973 : 4ème dan

1974 : vice-président de la Ligue d’Alsace de Judo – Président du comité du Bas-Rhin de Judo

1976 : professeur titulaire au CREPS – CTR Alsace  et CTI de l’Interrégion Est – abandon des mandats d’élus à la Ligue d’Alsace et au CD 67

1980 : 5ème dan

1982 : nomination au poste que CTR et CTI à temps plein – élection à la FISU (Fédération Internationale du Sport Universitaire)

1987 : 6ème dan

1994 : nomination au poste de Directeur Adjoint du CREPS de Strasbourg, chef du département du Sport de haut-niveau

2001 : 7ème dan

2003 : départ à la retraite du Ministère de la Jeunesse et des Sports

2004 : élection comme président de la Ligue d’Alsace de Judo et membre du comité directeur fédéral

2007 : fin du mandat de directeur de la FISU

2012 : fin du mandat de Président de la Ligue d’Alsace de Judo

2019 : 8ème dan