Après avoir donné naissance à un petit garçon fin juin 2023, Mélanie Legoux-Clément, sociétaire du SMC Marnaval (52), avait doucement repris la compétition, jusqu’au titre de championne de France seniors obtenu le 18 novembre dernier à Caen. Seulement 5 mois après avoir accouché. Retour sur cette journée et les perspectives pour la suite de la saison.

Le podium de la catégorie des -48kg
De gauche à droite : Anaïs Perrot ; Mélanie Legoux-Clément ; Mélanie Vieu ; Laura Espadinha
France Judo / S. Bonnet

5 mois après avoir donné naissance à votre premier enfant et douze ans après votre premier titre, vous voilà une nouvelle fois championne de France seniors [ndlr : 3ème titre, après 2011 et 2016]. Quel est votre sentiment par rapport à ce nouveau titre ? Comment vous êtes-vous sentie sur ces championnats de France ?

Je suis très contente, c’est vrai que c’était un gros challenge un peu fou de participer à ces championnats de France. Mais c’est ce qui m’animait dès la reprise, si je me sentais bien, pourquoi ne pas s’engager sur le championnat de France. Avoir une médaille aurait déjà été super, mais le fait de gagner, c’est encore plus fou. Je suis très satisfaite et fière du chemin parcouru pour en arriver là.

Je me suis sentie super bien sur la journée, très relâchée, bien présente dans mon judo. J’arrivais à placer mes mains, à être active et à attaquer. J’ai réussi à marquer durant les combats, ce qui n’était pas mon point fort avant ma grossesse, et cette année j’ai marqué sur quasiment tous les combats. C’est un des championnats de France où j’ai pris le plus de plaisir.

 

Qu’avez-vous mis en place au niveau de votre préparation pour décrocher l’or ? De qui vous êtes-vous entourée ?

J’avais fait un tournoi de préparation 15 jours avant [ndlr : le Challenge national seniors de la ville de Troyes ; où elle se classe 2ème]. Au niveau du judo, je n’avais pas de super sensations, mais physiquement je me suis rassurée car j’étais capable de tenir les combats sur des filles de niveau national. Ça m’avait rassurée sur ma décision de participer aux championnats de France, même si sur le plan judo j’étais sceptique car je n’avais pas beaucoup de sensations. Quand je regarde ma performance aux championnats de France, à 15 jours d’intervalle, ce sont deux compétitions totalement différentes.

Mélanie avant d’entrer sur le tatami pour la finale
DLM Pictures Photographies / Léa Plet

Grâce à votre titre de championne de France, vous êtes sélectionnée au Paris Grand Slam [2-3-4 février 2024], dans quel état d’esprit abordez-vous ce grand tournoi auquel vous êtes habituée ?

Je prends cette sélection comme une chance. Il n’y a pas grand monde qui aurait misé sur un retour au Paris Grand Slam dans l’année qui suit ma grossesse, même moi je n’y aurais pas forcément cru. Je suis super contente de cette sélection, elle fait partie des étapes de ma reprise. C’est le deuxième gros challenge de la saison, qui me permettra pourquoi pas de lancer la suite pour pouvoir repartir sur d’autres tournois à l’international. Ce tournoi me permettra de faire le point, et de voir où j’en suis par rapport aux filles de l’international que je n’ai pas prise depuis plus d’un an en compétition [ndlr : sa dernière sortie internationale remonte au Grand Slam de Baku en novembre 2022].

 

Quelles sont vos perspectives pour la suite de la saison ?

Je vais partir en stage au début du mois de janvier, pour préparer le tournoi de Paris. Avec la Fédération, il n’y a rien de mis en place. Dans tous les cas, avec mon club nous prévoyons de partir en stage et de participer à des tournois. Chaque chose en son temps bien sûr, mais j’ai envie de repartir sur des compétitions internationales car quand j’ai décidé de reprendre, c’était pour retrouver mon niveau sur la scène internationale. On va tout mettre en place pour retrouver vite le niveau des Grands Slams et pourquoi pas des championnats !

 

Comment avez-vous maintenu votre niveau de forme durant votre grossesse, pour être au meilleur niveau à la reprise ?

Durant ma grossesse j’ai été accompagnée par une super équipe. Ma sage-femme a été de bons conseils, et ma préparatrice physique est formée spécialement pour les athlètes de haut-niveau qui souhaitent avoir des enfants. Ça m’a beaucoup aidé. J’ai pu faire du sport quasiment jusqu’au terme, tranquillement, je faisais une séance tous les deux jours. J’ai fait du judo : de la technique, de la mobilité et du déplacement, jusqu’à début mai [ndlr : elle a donné naissance à son fils fin juin]. Quand le judo n’était plus possible à la fin de ma grossesse, j’ai continué le travail de renforcement musculaire, je faisais du vélo ou des exercices sans contrainte et sans risque pour le bébé.

Mélanie lors de sa finale face à Anaïs Perrot
DLM Pictures Photographies / Léa Plet

Comment s’est déroulée la reprise du judo après la naissance de votre fils ?

Je suis retournée à l’entraînement en septembre, avec l’objectif d’augmenter progressivement la quantité et la dureté des séances, selon comment je me sentais. Au début, je faisais de la technique et de la préparation physique légère, puis j’ai intensifié petit à petit. Fin septembre, j’ai repris les combats avec les jeunes, et courant octobre j’ai pu retourner à Paris. J’allais à l’INSEP et à l’INJ (Institut national du judo) pour avoir des sensations judo plus importantes. Dans le même temps, j’ai augmenté l’intensité de la préparation physique, j’ai rajouté des charges en musculation et fait davantage de cardio. Tout ceci m’a permis d’être prête sur le championnat de France.

 

A quoi ressemble votre vie désormais ? Entre le judo et votre vie de famille ?

Il y a deux ou trois ans, j’ai pris la décision de rester vivre à Reims avec mon mari, et de faire les allers-retours à Paris pour m’entraîner. Cette année, je suis le même schéma. Pour l’instant, je vais à Paris deux fois par semaine, mais à terme je m’y rendrai trois fois par semaine, pour faire des combats et avoir de l’opposition. A côté du judo, ma préparatrice physique m’envoie des séances que je fais seule à Reims.

Mon fils est gardé quatre jours par semaine, le temps que je m’entraîne. Ça me permet d’avoir l’esprit pleinement à l’entraînement, et de m’engager à 1 000% dans le haut-niveau. Quand mes entraînements sont terminés, je récupère mon fils, et profite des moments avec lui et mon mari le reste de la semaine.

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Interview et rédaction : Camille Tarteix.